Santé sexuelle des femmes : quand la désinformation devient un danger

Au Mali, la désinformation en matière de santé sexuelle expose de nombreuses femmes à des risques graves. Entre fausses croyances et rumeurs, les conséquences sur leur santé et leurs choix de vie sont préoccupantes.

Le réseau social TikTok, au-delà de son aspect de divertissement et d’éducation, contribue massivement à la propagation de fausses croyances et de stéréotypes souvent très dangereux autour de la santé sexuelle. Sur cette plateforme, on peut trouver des vidéos trompeuses en langue locale, ce qui les rend encore plus virales.

Des exemples alarmants

Des affirmations telles que « L’eau citronnée est un contraceptif », « On peut soigner les infections sexuellement transmissibles avec de l’ail» ou encore « Un mélange de Coca-Cola et d’autres produits peut provoquer un avortement» circulent largement. Nombreuses sont les femmes qui croient en ces conseils néfastes et les appliquent.

Que ce soit en matière de contraception, de prévention des infections, ou de soins de santé en général, ces fausses informations mettent en danger la santé et le bien-être de nombreuses femmes. Par manque de sensibilisation et d’accès à des informations fiables, de nombreuses jeunes filles et femmes s’appuient sur ces croyances erronées, avec pour conséquences des grossesses non désirées, des infections ou des maladies évitables. Ainsi, les jeunes, en particulier les femmes, sont les premières victimes d’informations erronées sur la santé sexuelle, ce qui compromet gravement leurs choix et leur sécurité.

Réseaux sociaux, sources d’information des jeunes Maliens

Selon l’enquête de perception des informations SSR d’Afrobarometer de 2020, environ 66 % des Maliens déclarent obtenir des informations sur la santé via les médias sociaux, les amis et la famille, indiquant ainsi une dépendance croissante à des sources non officielles. Le même rapport révèle qu’environ 35 % des jeunes femmes ont déclaré avoir pris des décisions en matière de santé sur la base d’informations trouvées sur les réseaux sociaux.

Planification familiale, un terrain miné par la désinformation

Par ailleurs, certaines rumeurs persistantes présentent les méthodes de contraception modernes comme dangereuses ou moralement inacceptables. « Dans certains milieux, il est courant d’entendre que chaque pilule contraceptive prise tuerait un fœtus en devenir » rapporte Maminata, paire éducatrice à Bamako.

Ces fausses informations peuvent entraîner des tensions dans des foyers où certains époux, influencés par ces rumeurs, refusent que leurs conjointes utilisent des méthodes contraceptives.

Un enjeu de santé publique

Pour limiter l’impact de cette désinformation, il est crucial d’agir sur plusieurs fronts, en commençant par valoriser les plateformes spécialisées en santé sexuelle et reproductive. Des campagnes de sensibilisation ciblées, accessibles aussi bien en zones urbaines que rurales, sont essentielles.

Par ailleurs, l’éducation aux médias et à l’information doit devenir un pilier de la prévention, permettant aux jeunes, et en particulier aux jeunes femmes, d’identifier et de vérifier les sources d’information fiables.

La désinformation liée à la santé sexuelle est un véritable problème de société qui touche des milliers de femmes maliennes. En sensibilisant le public, en renforçant l’accès à des informations vérifiées et en impliquant tous les acteurs de la société, nous pourrons créer un environnement où chaque femme est mieux protégée contre les dangers de la désinformation.

Pour que chaque femme puisse faire des choix éclairés et préserver sa santé, l’information doit être un outil de sécurité et non un vecteur de risque.

Mahamadou BAGAYOKO – Réalisateur de « ça Me dit Santé »

#ÇaMeDitSanté est une émission web sensibiliser les adolescents et jeunes aux questions de santé sexuelle et reproductive, incluant la santé mentale et la prévention des violences basées sur le genre.